PATRIMOINE
Coup de chance, la météo maussade avait décidé de faire un effort pour ce week-end du patrimoine.
Je me suis donc rendue, à pieds en bas de Chinon, pour apprendre à mieux connaitre un des fleurons de notre ville : la collégiale Saint-Mexme.
Une collégiale est une église desservie par un collège de chanoines, religieux astreints à la prière en commun, mais vivant de façon indépendante dans des maisons particulières, dont nous découvrirons plusieurs exemplaires au cours d'une promenade commentée sur le thème des cours et jardins des maisons canoniales.
Saint Mexme était un disciple de Saint-Martin, et a fondé à cet emplacement un monastère. L'église construite ensuite est un bel exemple du premier art roman en Touraine. Transformée en collégiale vers l'an mil, elle est reconstruite selon le modèle des basiliques romaines et régulièrement agrandie avec notamment un massif occidental comportant un narthex et deux tours reprises au XV° (à droite sur la gravure).
Désaffectée à la Révolution, elle s'effondre partiellement en 1817 perdant son gros clocher. Après travaux, une école y est installée jusqu'au début des années 80. Puis la restauration des bâtiments est entreprise. Les découvertes archéologiques font prendre la décision de conserver les monuments restants et de les transformer en centre culturel.
La collégiale aujourd'hui, réduite au massif occidental.
La façade romane, mutilée à la révolution portait un riche décor sculpté.
Subsistent quelques décors d'entrelacs et de végétaux (en haut à droite).
En franchissant la porte entre les tours, nous entrons dans le narthex et nous trouvons face au portail du XII° fermant la nef.
Le narthex est doté d'une voûte en plein cintre et ses murs sont rythmés par des arcatures.
Des sculptures sont à nouveau visibles ainsi qu'un moule à cloche, caché, lui sous ce plancher.
A droite, la chapelle sud conserve un superbe décor peint du XV°. A chaque phase de construction, les fresques ont été repeintes.
Ici, une fontaine de pitié, thème rare symbolisant l'universalité du message chrétien.
Là, un jugement dernier. Je trouve que ce diable n'a pas l'air très heureux de remplir son office ! Ce décor a été exécuté fin XV° après la reconstruction complète de la tour sud et restauré après 1853.
Un escalier XVIII° permet d'accéder à l'étage et d'admirer les vestiges de décor peints à la détrempe aux XII° et XIII° siècles dans la tour nord.
Dans la tribune, la première façade de Saint-Mexme (an mil) s'est retrouvée englobée dans les murs de la nef. Elle porte des peintures du XIII° siècle.
Un bas-relief de la crucifixion montre les débuts de la sculpture dans l'art Roman.
Les vitraux sans plomb ont été posés en 2006 et réalisés d'après des cartons d'Olivier Debré.
Depuis la tribune, nous avons une vue idéale sur la scène de théâtre totalement auto-portée installée dans la nef et qui accueille des spectacles depuis 2002. Elle ne peut s'appuyer sur les murs, Saint-Mexme ayant été classée monument historique par Prosper Mérimée dès 1840.
Cette petite sculpture ornait une clé de voûte et représente Sainte-Radegonde.
Retournons maintenant à l'extérieur découvrir les maisons canoniales dont je vous ai parlé.
Cette première maison, située à l'angle de la cathédrale a bénéficié d'une restauration soignée et les motifs des sculptures quoique récents reprennent les modèles de l'époque de construction. Un tout petit jardin carré abritant une très vieille glycine et cette délicieuse collection de nichoir lui apporte un charme certain.
A quelques pas, cette maison nous offre un double visage avec un début de construction moyennâgeux et des ajouts renaissance.
Le respect de l'histoire n'empêche pas forcément d'effectuer les améliorations nécessaires à une vie plus moderne, notamment des circulations plus commodes que les étroits passages et escaliers médiévaux. Bel aperçu sur un jardin sur cour vantant sur le portail ses chats et chiens gentils.
Celle-ci, plus récente, fin XVIII° si je me souviens bien, a été édifiée pour un riche négociant. J'aime les arcades des fenêtres, moins les sculptures un peu ostentatoires et les colonnades d'angle.
Avec cette demeure, blottie dans une petite rue offrant une vue intéressante sur tout le côteau, et le grand-Christ qui le surplombe, nous revenons au coeur du sujet. C'est une des maisons canoniales les plus anciennes et les plus richement dotées à l'époque. On retrouve sur ses murs les indices de puissance des places fortes, imités mais sans utilité réelle dans un bâtiment d'habitation. Créneaux, machicoulis, même une grand-porte avec un emplacement pour herse et pont-levis (non visible sur ma photo), tous les attributs seigneuriaux figurent mais sont inutilisables, créneaux emprisonnés dans les murs, machicoulis et descente de herse bouchés.
La statue qui veille du haut du côteau est un ex-voto géant, réalisé grâce à une souscription lancée par le curé de la ville dans les années 40 pour remercier le ciel d'avoir épargné Chinon, qui, bien qu'occupée par les allemands, ne fut pas bombardée.
A l'arrière de Saint-Mexme, ce superbe hôtel particulier, qui jouxtait semble-t'il les derniers bâtiments de la collégiale avant l'effondrement du clocher et d'une partie de la construction. Très élégant avec son escalier double et son fronton aux armes de la famille qui le possédait, il connut quelques vicissitudes avant de revenir aux mains d'un particulier attentif à son état. Une allée de tilleuls certainement centenaires au vu de leur circonférence fait face au bâtiment. C'est vous dire la prestance du lieu !
Enfin, derrière ce fronton très ancien, bien au chaud dans ses murs, une maison de toute beauté, enfouie dans une énorme bignone, offrant des arbres plus que centenaires, cèdre et ginko biloba, palmier, et de superbes vues sur Saint-Etienne et la collégiale.
J'ai été un peu (beaucoup) longue, mais j'ai encore succombé au charme de ma ville, et je voulais vous en faire profiter.
Bonne journée.