APRES LES ROSES
Mai les avait vues entrer dans la danse l'une derrière l'autre, ravies de se faire admirer. Juin, arrivé en éclatante fanfare de soleil, les pressait de se retirer, ce qu'elles firent une à une. D'autant que le ciel leur réservait ensuite force douches et rafales venteuses, allant jusqu'à la tempête. Le show des tardives, Ballerina, Bougainville, Félicité et Perpétue, Cardinal de Richelieu, en fut écourté.
Les deux dernières eurent cependant le bonheur de se croiser enfin.
Tandis que Veilchenblau consentait un ultime effort.
Les comparses géranium furent brillants, tout en sachant rester délicats.
Les clématites, toujours sur le point de fuite, fugaces et embarrassées. Si seulement elles voulaient s'affirmer !
Petit Itea, fidèle au poste, me parait avoir grandi. Autopersuasion ou réalité ? Il est en tout cas d'une floribundité sans faille. Et qui a décrété qu'il fallait être grand pour orner un jardin ?
Juin prit à mi route un virage sec et insolant. Le jardin ayant bien bu, 82 mm en dix jours, apprécia. Un petit tour de scène où s'ébattent nos joyeux protagonistes vous tente ? Quittons la maison par la porte-fenêtre donnant sur la terrasse et passons entre le massif Lune et le cerisier. Marie Pavie, toujours très en train, Bougainville, dans une année branches plutôt que fleurs, et l'éléagnus remis en boule, font face à Cardinal de Richelieu et son heuchère associée Dark secret.
Mais le passage s'est refermé, l'arbre à papillons, énorme, bouche le chemin. On attendra la fin de la saison pour intervenir. Faisons demi-tour.
De l'autre côté du cerisier, la voie est libre. Ballerina et mon bel inconnu font un semblant de haie d'honneur. Au fond, l'on aperçoit Guirlande d'amour, pas très déployée encore, ma suave guirlande, le cornus panaché, le cornus kousa Satomi en fleurs.
Devant Ballerina, au premier plan, une ballote toute simple qui me donne beaucoup de satisfaction. Sa couleur s'accorde à merveille avec le rosier et les feuilles vaguement pourprées des ancolies, son graphisme donne du peps et de la définition à l'ensemble en restant très doux.
Avançons de quelques pas pour jeter un coup d'oeil sur le massif Zen. Dans la partie Yin, verveines et verbascums se sont faufilés dans les branches du grand cornus tandis que stipes et penstemons ont opté pour l'alignement sage devant le seringat. Prenons au passage une large bouffée du divin parfum qu'il exhale. Avant qu'un autre délice vienne nous chatouiller le nez. Dans la partie Yang, Blush Noisette a décidé de la jouer solo et truste l'attention visuelle et olfactive.
Allons jusqu'à la haie où l'on mise plutôt sur le design ces temps-ci avec les sisyrinchiums et la stipe géante. Ghislaine de Féligonde attend son heure.
Nous pouvons revenir sur nos pas et constater quelques changements dans le petit fouillis italien. L'euphorbe myrsinite déplacée l'automne dernier s'est trouvé une camarade de choix avec l'heuchère Marmelade. Un duo tonique parfait pour seconder l'hémérocalle, bien décidée à faire oublier la défection temporaire du rosier qui la précède. Une touffe de camomille a eu la bonne idée d'amener sa touche fraiche à l'ambiance.
Continuons à longer l'allée des lierres, en saluant au passage Katarina Zeimet, puis Thalia Remontant. Après la cabane nous retrouvons le cornus kousa Satomi.
Avant de nous diriger vers la partie arrière du jardin, focus sur l'houttynie à fleurs doubles qui tapisse le pied du cornus, ainsi que sur le merveilleux deutzia à fleurs en corymbe auquel j'ai associé un splendide iris chrysographe. Dont je ne suis pas sûr de la survie dans le jardin mais il est si beau. Je veille.
Ah, oui, remerciement aux verveines et à la grande pimprenelle qui animent la toile de leurs jolies têtes et ombres assorties.
Nous sommes à présent parvenus aux abords du massif Lune qui réchauffe ses teintes pâles
au soleil de l'été sur le versant sud. L'harmonie bleutée que j'avais, ai toujours en tête, figure actuellement un joyeux méli-mélo dans lequel chacun trouvera sa place.
Dans le grand massif, Domaine de Courson fournit de méritoires efforts, dépassé par l'abondance et le poids de ses jolies têtes. Il a fallu que je lui vienne en aide, à l'étage du dessous, l'on commençait à manquer d'air.
C'eut été dommage de ne pas voir ce petit monde prospérer.
Et de manquer deux très jolies surprises, les premières floraisons d'une pivoine dont j'ai fini par oublier le nom et un iris foetidissima panaché qui n'avaient à ce jour offert que des feuilles.
Au terme de notre balade, les "Bords de Loire" nous accueillent dans une jolie touffeur végétale.
Le jasmin prend ses aises et embaume.
Le noisetier pourpre et la germandrée unissent des teintes violacées subtiles.
Et près du cabanon, sauges et valériane chipent la vedette au rosier voisin.
Dans une dernière pirouette, juin jette sur le jardin toute la chaleur et les rayons mis de côté en début de mois. Les plantes chuchotent sous le soleil brûlant, les feuillages guettent le moindre souffle d'air.
Attention, jardin ardant !
Très bon week-end.